Un volet de l’histoire canadienne de la traite des fourrures sur le fleuve Nelson

Publié le 20 juillet 2017

Vous adorez partir à l’aventure en plein air? Vous aimez les sensations fortes? Si vous avez envie de sortir des sentiers battus et de partir à la découverte d’une destination peu fréquentée, il est temps pour vous d’explorer des trésors cachés du Manitoba : le fleuve Nelson et le poste de traite historique York Factory. Une excursion avec l’entreprise Nelson River Adventures combine histoire et plein air et permet aux esprits aventuriers de visiter un endroit où peu de gens osent aller.

View of the York Factory

Le voyage commence

Le premier arrêt de notre expédition vers le lieu historique national du Canada York Factory est fait dans un village du nord appelé Gillam. Connue principalement comme point de transfert de Manitoba Hydro et pour ses imposants barrages hydroélectriques, la municipalité compte des travailleurs, des gens de la région et, occasionnellement, des personnes à la recherche d’une aventure en région éloignée. Pour s’y rendre, nous avons pris un vol de deux heures à partir de Winnipeg, puis un taxi, qui nous a menés de l’aéroport au village, en 2 minutes. On sait que l’on est dans un petit patelin quand le seul propriétaire d’un taxi possède aussi le restaurant et le bar.

Le lendemain matin, nous avons été accueillis par le propriétaire-exploitant de Nelson River Adventures, Clint Sawchuck. Emportant notre petit-déjeuner, nous sommes montés à bord du spacieux véhicule et avons parcouru un trajet de 40 minutes pour nous rendre au bateau. Clint était notre guide pour la journée, accompagné de Grizz. Le bateau était propre et spacieux. Nous pouvions nous asseoir à l’extérieur, à l’arrière du bateau, pour voir le paysage défiler. Nous avons vu des ponts abandonnés, des dragues, d’immenses visages de pierre, des kilomètres de rives boisées et même des rapides à vous donner le vertige.

Avec un trajet de 3 heures à faire à l’aller, nous avons pris à tour de rôle le siège du passager pour parler avec Clint, de sa vie et de son entreprise. J’ai appris que Clint a grandi sur une ferme à Russell. Lorsque je lui ai demandé comment un garçon né sur une ferme s’est retrouvé à parcourir le fleuve Nelson, Clint s’est contenté de rire et de raconter comment il avait décidé de partir en bateau pour la première fois sur le fleuve Nelson. Il a continué de faire des expéditions pour étudier les niveaux de l’eau, les courants et les caractéristiques géologiques. J’étais collée à mon siège (littéralement, le trajet était plutôt cahoteux et je m’agrippais à mon siège), lorsqu’il a raconté une excursion particulièrement difficile. Il s’était alors échoué dans une baie, avec deux ours blancs à proximité.

Si vous pensez que l’on voit des ours blancs et des bélugas seulement à Churchill, vous vous trompez. Nous avons tous regardé lorsque Clint a repéré un troupeau de bélugas au loin en entrant dans la baie d’Hudson. Il n’est pas inhabituel de voir des ours blancs nager jusqu’au rivage après la fonte des glaces, et encore moins rare d’apercevoir des phoques nager dans les eaux de la baie. Nous n’en avons pas vu durant ce voyage, mais n’avons pas été déçus par la faune. Nous avons été émerveillés par le nombre d’aigles à tête blanche qui planaient dans le ciel et se posaient sur les cimes les plus hautes. Clint nous a dit que le fleuve n’avait pas plus de six pieds de profondeur à cet instant. Le choix du moment est absolument crucial pour ce genre d’aventure, si on ne veut pas se faire piéger par la marée.

Dan Harper
York boat ruins at York Factory Historic Site
Dan Harper

L’arrivée au lieu historique national du Canada York Factory

Après une traversée agréable et étonnamment calme, nous sommes arrivés à la principale attraction : l’historique poste de traite York Factory. C’était surréaliste de trouver une trace de civilisation après ce trajet en pleine nature sauvage. Nous avons reçu un bel accueil de Parcs Canada et avons débuté l’exploration de l’un des volets les plus importants de l’histoire de la Compagnie de la Baie d’Hudson. York Factory était un établissement et un poste de traite de la Compagnie de la Baie d’Hudson. Bien que le poste existe depuis le 18e siècle, il a été officialisé seulement en 1821. Au plus fort de la production, York Factory transigeait 40?000 plues par année (une forme de monnaie représentant la valeur d’une peau de castor).

En nous promenant, nous sommes allés voir de plus près la barge d’York (ce n’est pas un vestige historique, mais une convaincante réplique apportée sur place pour le tournage d’un film) et avons visité le cimetière. La plus ancienne pierre tombale appartient à William Sinclair, un traiteur en chef décédé en 1818. Parcs Canada consulte les Premières Nations d’York Factory et de Fox Lake concernant les plans de restaurations. Près du cimetière, se trouvent les ruines d’une poudrière que Parcs Canada prévoit démanteler pour la rendre plus sécuritaire.

C’est entrant dans York Factory que notre groupe a pu se faire une idée de ce que pouvait être la vie dans cet établissement. Les fenêtres jouaient un rôle très important, car les bougies et les lampes à l’huile ont été interdites par la Compagnie de la Baie d’Hudson qui avait subi trop de pertes dans des incendies. Comme les bâtiments étaient construits sur le pergélisol, ils n’avaient pas de fondations et avaient la capacité de s’adapter aux variations météorologiques. Les bâtiments de ce site pouvaient être ajustés en fonction de ces changements pour relâcher une partie de la tension.

Le bâtiment comportait deux parties semblables, soit deux entrepôts de chaque côté qui contenaient exactement les mêmes marchandises pour plus de commodité. Nous avons visité le bâtiment au complet et avons vu de nombreux artéfacts découverts sur place ou rejetés sur la berge. Nous avons regardé attentivement des bouilloires, des boulets de canon, des cloches, des couteaux, des bols et divers articles essentiels à la vie en ces lieux.

Des aînés de la Première Nation de York Factory se racontent

Après avoir visité les différentes pièces et avoir admiré la vue à partir du point d’observation le plus élevé, nous sommes sortis rejoindre des aînés de la Première Nation d’York Factory qui nous attendaient pour nous raconter leur histoire dans la région. À l’apogée de la traite des fourrures, la Compagnie de la Baie d’Hudson avait avantage à entretenir de bonnes relations avec les Autochtones et à s’assurer qu’ils étaient satisfaits et prospères. Les choses ont changé à la fermeture du poste York Factory et la Première Nation a été déplacée dans une région maintenant appelée York Landing.

Flora Beardy a été la première à parler des relations entre la Compagnie de la Baie d’Hudson et les peuples des Premières Nations qui vivaient dans la région. Les Autochtones travaillaient comme intermédiaires et fournissaient à la Compagnie de la Baie d’Hudson du bois de la rivière de Dieu, ainsi que des oies, des canards et du poisson. Les femmes autochtones ont joué un important rôle en s’assurant que la viande était parfaitement conservée. La Compagnie de la Baie d’Hudson a rapidement adopté ce mode de vie pour survivre dans les dures conditions de York Factory, particulièrement en ce qui concerne l’habillement.

Dan Harper

Flora nous a raconté l’histoire de Thanadelthur, une jeune Déné de 15 ans qui a été gardée comme esclave par les Cris. Elle est arrivée à York Factory à moitié gelée. Elle y a été accueillie et on lui a enseigné l’anglais, pas seulement en signe d’hospitalité, mais dans le but qu’elle puisse contribuer à la réussite d’un essor commercial majeur. Thanadelthur a participé aux négociations entre les Cris et les Dénés. On dit qu’elle a travaillé si longtemps comme interprète que sa voix en est devenue rauque. Thanadelthur aurait joué un rôle majeur dans le succès de l’expansion vers le nord, ce qui a par la suite permis la création du fort Prince-de-Galles, il y a 300 ans.

Wooden path at the York Factory site
The Bridgade

En dégustant les plats préparés sur le barbecue par Grizz et Clint, nous avons continué d’écouter des histoires et de discuter avec Louisa Constant et Jeff Beardy de la Première Nation de York Factory. Plusieurs membres de notre groupe auraient aimé continuer la discussion avec les aînés, mais la marée nous appelait. Nous sommes retournés au bateau à 15 h 30, juste à temps pour traverser la baie d’Hudson Bay avant que la marée se retire de nouveau.